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George Musters > le Tehuelche Blanc

George Musters
George Chaworth Musters est plus connu sous ses surnoms le Tehuelche Blanc, le Roi de patagonie, le Livingstone de Patagonie, le Marco Polo de la patagonie. Musters est un anglais né à Naples en 1841. A treize ans il intègre la marine de Sa Majesté et participe à la guerre de Crimée. Il est promu officier à 20 ans et parcours les mers de l’Atlantique Sud jusqu’en 1866, date à laquelle il quitte la marine. En 1860, il tente un projet d’élevage de mouton en Uruguay qui ne prospère pas.

En 1869, en passant par les îles Malouines (britannique depuis 1833), le jeune aristocrate Anglais décide d’entreprendre un voyage à travers la Patagonie.
Il est considéré comme le premier homme blanc à avoir parcouru dans son entier cette région. 11 mois de voyage à cheval et plus de 2750km parcourus du Sud au Nord pour terminer sur la côte Atlantique en compagnie de différentes tribus d’indiens Tehuelches. Il fait la connaissance des principaux chef de tribus (les cacique, Orkeke, Casimiro Biguá*, Foyel, Sayhueque) et laisse y témoignage passionnant sur les us et coutumes des habitants de ces régions de la Patagonie aujourd’hui disparus ainsi que la cohabitation avec les descendants de ce qui reste des premiers colons espagnol et des récentes colonies galloises.

Musters embarque pour Punta Arenas en emportant avec lui des lettres de recommandation pour Luis Piedra Buena qui est basé sur l’île Pavón, et pour Aguirre à Murga de Patagones. Elles ont été fournies par George Dean, un représentant des intérêts économique des Etats-Unis sur les îles.

En avril, il quitte Punta Arenas accompagné d’un groupe de soldats et de baqueanos dépêchés par le gouverneur Viel qui le laisseront à la première étape. Sa feuille de route passe par trois points de passage sur les quatre habités par des blancs européens: Punta Arenas son point de départ, la base Piedra Buena (sur l’île Pavon à l’embouchure de la rivière Santa Cruz) et Carmen de Patagones son but final. Soit trois points de repère sur une surface égale à trois fois la superficie de la France.
Arrivé à Pavon, Piedra Buena n’y est pas, ni sa goélette. Musters l’y attend quelques mois. Il y rencontre Holstein, surnommé “Cook” (Cuisinier). L’année antérieure Holstein avait remonté la rivière avec Gardiner et tous les deux avaient rejoint le Lago Argentino. Durant cette expédition ils avaient retrouvé la trace de l’expédition de Fitz Roy et de Darwin (en 1832) en l’espèce de conserve de viande. Au retour de cette expédition ils avaient dessiné l’une des toutes premières carte de la région.

Comme Piedra Buena semble ne pas arriver, Musters décide de quitter Pavon le 8 août en profitant du passage d’un groupe d’indiens Tehuelches de la famille de Orkeke pour continuer sa route.
La suite de son périple sera pour le moins rocambolesque et la somme des anecdotes sont savoureuses.

Le cacique Orkeke n’avait pas d’enfants et reporté tout son paternalisme sur son chien qu’il traitait comme un enfant adoptif. Il possédait sa propre cavalerie! Voyant le cheval de Muster fatigué il propose au chien de lui en prêter un mais devant le silence de ce dernier il considère qu’il est d’accord…

photo indiens tehuelches
Tehuelches à Patagones et Casimiro Bigua (vignette)

Musters voyageait sous la protection du cacique de la troupe. Dans ces tribus, non pas que celui-ci ait l’autorité sur les familles formant la caravane mais il est plutôt une référence et un chef en cas de guerre. Chacun est libre de le rejoindre ou de le quitter.

Dans le Nord, la caravane rejoint les Tehuelches du Nord du cacique Casimiro Biguá* qui avait les faveurs du président argentin Mitré. En échange de son “amitié” le cacique reçoit quantité de chevaux et vaches qui sont sa richesse et sa monnaie d’échange pour le troc.
Dans les premiers jours de 1870, il se joint à Casimiro. C’est l’époque où Calfucurá, un cacique de la Pampa, prépare un grand malon (razzia) sur Buenos Aires. C’est l’effervescence dans toutes les tribus indiennes. Des parlements sont organisés pour décider ou non de le rejoindre. Pour la chance de Musters, Casimiro s’y refuse.
Devenu par la suite grand cacique de tout le sud, Casimiro Biguá devient en mars 70 protecteur des tribus de Patagonie. La caravane arrive en mars sur le territoire du cacique Sayhueque dans le pays des pommes, territoire de “las manzanas”, un héritage des plantations de pommiers faites un siècle plus tôt par les missionnaires jésuites et franciscains dans les régions. Les Manzarenos sont connus pour être des indiens braves, guerriers. Ils cherchent à profiter des intérêts des deux côtés de la cordillère, côté Chili et côté Argentine.

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Musters poursuit sa route avec la caravane de Casimiro et se dirigent cette fois vers l’Est à destination de Carmen de patagones, finalité de son voyage.
La traversée de la Patagonie centrale est rude, une succession de plateaux, de rivières et le vent presque omniprésent.
Le village de Carmen de Patagones et sa région est habité par environ 2000 âmes. Un village digne du far-west. Musters y rencontre un indien appelé le “cacique anglais” car il prétend descendre d’un officier anglais qui accompagnait Fitz Roy dans son expédition; un français installé comme pêcheur, des repris de justice qui s’improvisent en commerçant-contrebandiers à la faveur des indiens. Lorsqu’ils veulent voyager ils commettent de nouveau un délit, ils sont envoyés à Buenos Aires pour être jugé et condamnés à aller vivre à…Carmen de Patagones…

Musters revient à Buenos Aires en août 1870 et en décembre on le retrouve à Londres où se publie en 1871 sa relation de voyage At home with the patagonians.
Il se marie en 1876 et revient en Amérique du Sud comme chercheur d’or dans les mines de Bolivie. Il est nommé deux ans plus tard Consul britannique en Mozambique mais décédera avant de trouver son poste. Il meurt en 1879 à l’âge de 38 ans à la suite d’une opération médicale.

George Musters en Patagonie
L'itinéraire de Musters en Patagonie (1869-1870)

* Casimiro Bigua (1819-18?): Le nom de ce cacique porte le surnom de son père (bivoie, espagnolisé il devient bigois et s’écrit bigua). Adopté à l’âge de 10 ans par le corsaire français François Fourmantin (dit “bi-voie”) alors gouverneur militaire de Carmen de Patagones.
Très jeune il s’échappe pour rejoindre ses coreligionnaires et s’élève au rang de cacique des Tehuelches à l’âge de 21 ans, en 1840 à la mort de “Maria la Grande” la reine de tous les Tehuelches.

Il est reconnu comme le chef et protecteur de tous les Tehuelches depuis le détroit de Magellan jusqu’au fleuve Rio Negro au nord de la Patagonie.
Il servira toute sa vie la cause de ses gens à une époque où ce territoire n’était ni argentin ni chilien. Les prétentions des uns et des autres l’amenèrent à établir des relations diplomatiques pour conserver ses avantages et servir les intérêts des familles indiennes.
Côté chilien ont le nomma Capitaine tandis que côté argentin il devint lieutenant-colonel avec la pompe et les rétributions d’usages.

Il put maintenir tant bien que mal la souveraineté des Tehuelches sur le territoire de la Patagonie mais préféra disparaitre plutôt que de se rendre lors de la prise de possession d’une grande partie de la Patagonie par l’Argentine par les campagnes militaires du général Roca (1876/1884).

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