Antarctique Argentine > une terre de coopération internationale


Il y a 100 ans, le 14 décembre 1911 Roald Amundsen et ses compagnons atteignaient leur but, la conquête du Pôle Sud. Aujourd’hui, ce continent continue d’alimenter bien des énigmes scientifiques et est objet d’une étude permanente de la part des pays qui se partagent chacun une portion.

L'”Antarctique Argentine” fait partie depuis 1904, comme les îles Malouines depuis 1833, des territoires revendiqués de longue date par le pays. Comprenant la péninsule Antarctique et un cône entre les méridiens 25° ouest et 74° ouest et la latitude 60° sud jusqu’au pôle Sud, c’est pour les Argentins, depuis l’école, une image d’Épinal de la “souveraineté”.
La Direction nationale de l’Antarctique est en Argentine l’équivalent d’un ministère. C’est une institution stratégique dépendant de la présidence et du ministère de la Défense.

Mais c’est surtout aujourd’hui une terre de coopération internationale.

C’est une drôle de vie pour ces Argentins habitués aux terrasses de café de Buenos Aires: cent après la
conquête du pôle Sud, Pablo Polcher, Andrea Juan et Hernan Sala ont choisi de vivre et travailler en Antarctique.

“C’est un lieu à la fois dans le monde et hors du monde”, explique Andrea Juan, responsable des projets culturels pour l’Antarctique, qui vit souvent dans l’une des six bases permanentes que possède l’Argentine. “C’est une terre vierge, magique”, ajoute-t-elle.

Un lieu changeant aussi. “Le climat y est capricieux”, lâche Pablo Polcher, un chimiste célibataire de 29 ans de passage à Buenos Aires en plein été austral, avant de repartir dans un froid inouï: la température record enregistrée est de – 89,3° et les vents peuvent atteindre 320km/h.

“On peut y avoir le matin un ciel bleu, puis vers midi une tempête de pluie”, poursuit ce spécialiste de la glaciologie.

C’est parfois très violent. “Le vent fait tomber antennes et poteaux et la grêle frappe les parois des pavillons comme si on nous tirait dessus”, explique Mario Mémolli, à la tête de la Direction nationale de l’Antarctique.

“Les bases qui se trouvent sur la côte sont plus clémentes”, souligne M. Mémolli, énumérant “sa connexion internet, véritable bouée de sauvetage, sa téléphonie IP, sa petite salle de cinéma dotée de 53 sièges, son gymnase et sa bibliothèque”.

“Mais celles qui sont près du pôle sont très isolées: on y va seulement une fois par an et on doit y vivre avec le soleil 24 heures sur 24 ou tout le temps dans la nuit”, poursuit-il.

Ceux qui veulent s’y rendre doivent passer des examens, y compris psychiques, très poussés.
Personne ne peut y rester plus de 14 mois: le rythme cardiaque en dépend.

Pour Andrea Juan, les expérimentations artistiques sont une passion sans frontières. Elle a même accueilli un expert russe en musique expérimentale sur le continent blanc.

Doris Abelle, une Allemande, se dit très à l’aise au sein d’une équipe germano-argentine de scientifiques spécialisés dans le réchauffement climatique.

Cette solidarité, essentielle dans une terre hostile, est aussi faite parfois d'”apparitions” qui font la magie des lieux.

“Nous étions dans un refuge, près de la plage, à quelques kilomètres de la base, lorsque nous avons vu à l’horizon, où la mer et les glaciers se confondent, deux personnes marchant vers nous”, raconte Hernan Sala, un climatologue de 43 ans, célibataire et père de deux enfants.
“Au bout d’un moment, nous avons vu à la couleur de leur tenue qu’ils n’étaient pas des membres de notre base”, a-t-il poursuivi.
“Lorsque nous sommes allés à leur rencontre, ils nous ont dit en anglais qu’ils faisaient partie d’une expédition d’un pays d’Europe de l’est”, a ajouté le climatologue argentin. “Ils étaient trempés, après avoir perdu leurs barques et avoir marché quelque 4 km avec de l’eau jusqu’à la poitrine.”

AFP
Photo: ISS oct 2011

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